FORMALISME (arts)

Article

François-René MARTIN

Edité par Encyclopædia Universalis - 2012

En histoire de l'art, le formalisme ne peut être dissocié d'une interrogation sur le style. En cela, son objet est l'analyse de l'art, conçu, pour reprendre les termes de l'historien de l'art et critique Meyer Schapiro (1904-1996), comme « un système de formes qui possèdent une qualité et une expression significatives rendant visibles la personnalité d'un artiste et la conception générale d'une collectivité ».Précisément, le dessein du formalisme, tel qu'il s'est développé dans la seconde moitié du XIXesiècle et au début du xxe, fut de mettre en œuvre des schémas d'analyse du style qui, tirant l'œuvre vers la « forme pure » et cherchant dans la forme elle-même les lois du changement stylistique, faisaient abstraction de tous les autres facteurs qui conditionnent la création.À travers le style, l'historien de l'art peut s'interroger sur les valeurs religieuses, sociales ou morales véhiculées à l'intérieur d'un groupe humain par les formes artistiques. Il peut considérer également la succession des œuvres dans le temps, rapporter le cas échéant les changements stylistiques à des événements ou phénomènes historiques. Enfin, il peut isoler des individualités stylistiques, en repérant les idiomes propres à certaines personnalités. Même quand les archives font défaut, le connaisseur a la faculté de reconstruire autour d'un « nom de commodité », sur un fondement strictement formel, l'œuvre d'artistes dont nous avons perdu jusqu'au nom – tels que le « maître des Crucifix bleus » ou le « maître H.L. » –, mais dont la cohérence s'impose d'un point de vue visuel.D'un point de vue historique, le formalisme, tel qu'il s'est constitué en Allemagne dans le sillage de l'esthétique kantienne, ou suivant celle d'un de ses interprètes, Johann Friedrich Herbart (1776-1841), implique une réflexion aiguë, voire critique, sur la représentation du réel. De ce fait, le formalisme accompagne l'insurrection des avant-gardes contre les conventions « réalistes » ou « classicisantes » de l'art. Mais cela sans réclamer forcément un éloignement de la nature, et encore moins de la norme classique.Ainsi, pour l'historien de l'art allemand Konrad Fiedler (1841-1895), le visible n'est pas le résidu d'une épuration de la perception, pas plus que la forme ne devrait consister en ce qui reste lorsque l'on a éliminé le contenu. Selon cet auteur, l'art sert tout au contraire à objectiver le monde et à enrichir la conscience que nous en avons. L'activité créatrice, plus que la forme achevée, est alors au centre de la réflexion du théoricien (« De la manière de juger les œuvres des arts plastiques », 1876, texte repris en français dans ses Essais sur l'art, 2002). En insistant sur le processus de la création artistique, sur ce qu'il nomme la « libre création formelle », Fiedler remet en cause de manière radicale les constructions génétiques qui faisaient de la tradition un agent puissant, surdéterminant le cours de l'histoire de l'art. « Tout ce qui a déjà été soumis à un processus intellectuel

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Biographie

Stefan Zweig (/ˈʃtɛ.fan t͡svaɪ̯k/), né le 28 novembre 1881 à Vienne en Autriche-Hongrie et mort le 22 février 1942 à Petrópolis au Brésil, est un écrivain, dramaturge, journaliste et biographe autrichien. Ami de Sigmund Freud, Arthur Schnitzler, Romain Rolland, Richard Strauss, Émile Verhaeren, Stefan Zweig a fait partie de l'intelligentsia viennoise. Il quitte son pays natal en 1934, en raison de la montée du nazisme et de ses origines juives, pour se réfugier à Londres, puis au Brésil où il se suicidera avec sa femme Lotte . Son œuvre est constituée essentiellement de biographies (Joseph Fouché, Marie-Antoinette, Marie Stuart), mais aussi de romans et de nouvelles (Amok, La Pitié dangereuse, La Confusion des sentiments, Le Joueur d'échecs). Dans son livre testament, Le Monde d'hier. Souvenirs d'un Européen, Zweig se fait chroniqueur de l'« âge d'or » de l'Europe et analyse ce qu'il considère comme l'échec d'une civilisation.