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DESPOTISME ÉCLAIRÉ
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Edité par Encyclopædia Universalis - 2009
Forgée probablement par des historiens allemands au cours du XIXesiècle, l'expression de « despotisme éclairé » est maintenant consacrée. Celle d'« absolutisme éclairé », comme divers auteurs l'ont fait remarquer, eût été sans doute préférable pour désigner le système de gouvernement, dans sa théorie et sa pratique, qui connut un tel succès – faut-il dire de mode ? – au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle et dans l'attente sourde de la Révolution. De quoi s'agissait-il en effet, sinon essentiellement d'adapter les monarchies absolues du passé à l'esprit nouveau, à cet esprit européen des Lumières (en allemand Aufklärung, en anglais enlightenment), à cette « philosophie » aux cinq maîtres mots : individu, raison, nature, progrès, bonheur ? De la sainte alliance de la philosophie et du pouvoir sortirait le bonheur des peuples, octroyé à ceux-ci d'en haut. La formule correspondait à un incoercible appétit de réformes dans l'opinion « éclairée ».Malgré des variantes considérables selon le lieu, l'époque et surtout la personne du prince, la théorie et la pratique du système rentrèrent dans un schéma général.La fameuse « secte » des physiocrates ou économistes, avec son étrange doctrine du despotisme légal, et compte tenu de ses préoccupations spécifiques, joua sa partie dans le grand concert du despotisme éclairé.Mais le déclin de la formule était inscrit dans sa teneur même. Une tentative d'adapter l'antique autorité à l'esprit du siècle, progressive à son heure, ne pouvait être que de transition. Fragile était l'alliance des « philosophes » et du pouvoir. Éclairés ou non, les gouvernés allaient réclamer d'avoir voix au chapitre. Les tenants légitimes du pouvoir, même se piquant personnellement de « philosophie », n'avaient garde d'oublier que, somme toute, leur métier était d'être rois. Et 1789, en toute hypothèse, le leur eût rappelé.
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