PROLÉTARIAT -and-amp; PROLÉTARISATION

Article

Serge MALLET

Source : Universalis Edu - 2017

« Que les classes dirigeantes tremblent à l'idée d'une révolution communiste ! Les prolétaires n'y ont à perdre que leurs chaînes, ils ont un monde à gagner » (Karl Marx, Friedrich Engels, Manifeste du Parti communiste, 1848). Avec le Manifeste, le prolétariat fait son entrée dans l'histoire comme classe porteuse de l'avenir. Jusqu'à la Ire Internationale, les penseurs et écrivains révolutionnaires s'adressent au « peuple ». La terminologie nouvelle marque le passage de l'idéologie révolutionnaire égalitaire, mais formulée en termes sociologiques (les classes riches et les classes pauvres), à l'idéologie marxiste, qui s'appuie sur l'analyse économique du capitalisme en plein développement.Le concept de prolétariat est différent de celui de classe ouvrière. La classe ouvrière est une notion sociologique et, comme telle, complexe et multiforme : il n'y a jamais eu de classe ouvrière homogène du point de vue de la qualification, du niveau de revenu, de la situation dans la production, etc. Les marxistes appuient par contre leur définition du prolétariat sur trois aspects essentiels dérivés de l'analyse économique qu'ils font du mode capitaliste de production : le prolétariat est le produit de l'organisation industrielle du travail et il n'existe que dans et par la grande industrie ; le prolétariat est le producteur de la plus-value qui permet la reproduction élargie du capital (le prolétariat est donc la source de tout le progrès économique et technologique) ; l'insécurité du travail est un élément constitutif de la situation prolétarienne. Cette insécurité n'est pas liée aux aléas de la conjoncture, mais au mode de production capitaliste lui-même qui a besoin de l'existence d'une armée de réserve industrielle pour corriger les mécanismes du marché.Du point de vue du concept marxiste, le prolétariat ne se réduit pas à la seule couche des ouvriers manuels ; par contre, il n'englobe pas nécessairement toute la population laborieuse. Il est déterminé par sa place dans les rapports de production : producteur de la plus-value, il est exclu de la propriété et de la gestion desdits moyens de production. C'est cette situation exceptionnelle qui donne au prolétariat sa spécificité historique en tant que classe ; les autres classes qui ont lutté pour la conquête du pouvoir dans l'histoire passée ne luttaient que pour assurer leur domination sur les autres couches de la société. Le prolétariat, parce qu'il est la classe sur laquelle repose toute l'infrastructure de la société moderne, ne peut se libérer qu'en libérant du même coup toute l'humanité. La société socialiste ou communiste qu'il réalise assure le développement harmonieux des forces productives telles que le mode capitaliste de production les a engendrées, mais auxquelles le capitalisme impose des contraintes insupportables, génératrices de crise et de gaspillage de ses forces. Néanmoins, le prolétariat, en tant que classe formée par le mode capitaliste de production, est marqué par son producteur : il est réifié. Il ne peut aboutir à la conscience historique de son rôle, forger sa propre conscience de classe, qu'au travers du mouvement ouvrier.Le concept de prolétariat tel qu'il a été défini par les créateurs du marxisme a été repris par le mouvement ouvrier. Est-il encore opératoire dans la période actuelle ? La société capitaliste, sous la pression du mouvement ouvrier lui-même, a changé ; les classes sociales ont connu d'importantes mutations et la condition ouvrière elle-même apparaît aujourd'hui moins tragique qu'elle ne l'était en 1848. Pourtant, les caractéristiques essentielles qui déterminent l'existence du prolétariat demeurent : le développement du mode capitaliste de production a prolétarisé des couches sociales de plus en plus importantes et a élargi cette prolétarisation à l'ensemble du globe. Dans ce développement, en profondeur et en surface, la société capitaliste a pu éviter que ne se réalise cette rencontre du prolétariat et de la révolution que les marxistes attendaient en 1848. Mais l'expansion du prolétariat engage aujourd'hui le globe tout entier dans une lutte limitée au début du xixe siècle à quelques régions de l'Europe.

Consulter en ligne

En savoir plus

Biographie

André Devigny, né le 25 mai 1916 à Habère-Lullin (Haute-Savoie) et mort le 12 février 1999 à Rumilly, est un général et résistant français, compagnon de la Libération et grand officier de la Légion d'honneur. Au cours de la Seconde Guerre mondiale, il combat en 1939-1940 lors de la campagne de France au , puis, après la défaite, s'engage dans la résistance. Son arrestation en avril 1943 par les Allemands, sa détention à la prison Montluc à Lyon et son évasion le 25 août, trois jours avant son exécution, sont relatées dans une série d'articles du Figaro Littéraire d'après-guerre, puis dans son livre publié en 1956 intitulé Un condamné à mort s'est échappé. Son histoire est immortalisée en 1956 par un film de Robert Bresson, Un condamné à mort s'est échappé, qui aura le prix de la mise à scène au festival de Cannes en 1957. Après son évasion, il reprend le combat à partir d'août 1944 au bataillon de choc du commandant Gambiez, au sein de la 1re armée française du général De Lattre, et participe à la libération de la France. Après-guerre, il joue un rôle important dans les services secrets en tant que chef du service Action (SA) du SDECE de 1964 à 1970. Plusieurs fois blessé au cours de son parcours militaire exceptionnel, il est titulaire de 12 citations et de nombreuses décorations françaises et étrangères.