MOHANDAS KARAMCHAND GANDHI (1869-1948)

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Joël KERMAREC

Edité par Encyclopædia Universalis - 2009

Leader nationaliste et chef spirituel, réformateur social et promoteur d'un nouveau style d'action politique, Mohandas Karamchand Gandhi, surnommé le Mahātmā (« la Grande Âme »), a marqué de son empreinte l'évolution récente de l'Inde en même temps qu'il atteignait une audience mondiale.Son prestige sur l'Occident tient à une synthèse inaccoutumée bien qu'elle ait été réalisée au cours de l'histoire ancienne, où le sage était guide spirituel en même temps que visionnaire politique, mais il se comprend plus aisément dans le climat oriental de la pensée où métaphysique et éthique forment un circuit direct dépourvu des articulations rationnelles qu'y a apportées la pensée occidentale.De lui-même il a dit : « Je suis un idéaliste pratique » (Hind Svarāj, 11 août 1920). Et sans nul paradoxe sa tentative est celle d'une « expérience de la vérité », selon le titre qu'il a donné à son autobiographie. Proche de la pensée islamique pour qui Dieu, justice et vérité s'identifient, mais selon une orchestration proprement hindoue. Rien ne l'illustre mieux que cette intuition qui marque un événement de sa VIe (« Dieu est vérité ») l'introduisant à une autre intuition plus fondamentale (« La vérité est Dieu ») [Young India, 31 déc. 1931]. La première exile la vérité à l'infini, la seconde ramène Dieu sur les chemins de tous les jours comme l'eau sacrée et quotidienne du Gange se prend religieusement au creux des mains.Celui qui pratique le vrai ou le juste en même temps se divinise, et réciproquement celui qui veut se diviniser, fidèle à la philosophie hindoue pour qui « Dieu seul est, rien d'autre n'existe » (Young India, 31 déc. 1931), doit suivre dans son action les veines de la justice ou de la vérité. Une fois pour toutes, en ce point central de l'expérience gandhienne se joignent inséparablement l'orant religieux et le libérateur national, le mystique et le politique, l'ascète et le meneur de foules.De ce nœud fondamental procède une psychologie. Gandhi est courtois et cependant catégorique, pur dans ses intentions et cependant assez avisé pour prendre l'adversaire en son point faible, impatient mais sachant attendre son heure et même accepter provisoirement des concessions, injurié dans ses vêtements de gentleman britannique et se faisant accueillir avec enthousiasme en simple pagne au Parlement de Londres, écrivant les Lettres à l'Ashram, véritable traité de spiritualité, et dictant les statuts d'une nouvelle constitution pour « Mother India ». Mais ce panorama psychologique est avant tout l'histoire et la découverte d'une vie.

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