BRETÉCHER CLAIRE (1940-2020)

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Nelly FEUERHAHN

Source : Universalis Edu - 2020

Dans un monde dominé par les créateurs masculins, Claire Bretécher dessine d'abord pour la presse jeunesse et participe à partir des années 1960 à ses transformations majeures. Elle introduit des personnages comiques, surtout féminins, totalement inédits, loin des habituels héros de papier faire-valoir de la virilité.Claire Bretécher naît à Nantes le 17 avril 1940 dans un milieu bourgeois et catholique. Son éducation est confiée à un établissement des Ursulines de Jésus, une source d'amusement pour l'adolescente. Elle lit et copie les histoires illustrées de Cœurs Vaillants, Lisette, La Semaine de Suzette avant de créer très tôt ses propres récits. Son goût pour le dessin la conduit à l'École supérieure des beaux-arts de Nantes, étape suivie d'une brève période d'enseignement. Elle part pour Paris où elle place des dessins et quelques récits dès les années 1960 dans la presse franco-belge pour la jeunesse (Record, Tintin, Spirou). Pour Tintin, elle propose quelques gags (1965-1966). L'album Décollage délicat (Glénat, 2006) a regroupé divers récits de cette première période dont « Baratine et Molgaga » (Record, 1968-1975), « Les Gnangnan » (Spirou, 1967-1970), puis des récits où la parodie domine comme « Robin des foies » (Spirou, 1969-1971), autant d'antihéros ridicules qui sont sa signature. Elle illustre « Le Facteur Rhésus » (L'Os à moelle, 1963 et 1964) de Goscinny puis « Les Naufragés » (Spirou, 1968-1971) de Raoul Cauvin.Avec « Cellulite », publié dans Pilote en 1969, Claire Bretécher introduit un personnage de princesse, véritable contre-pied des conduites féminines habituelles. Seule femme dans le magazine dirigé par Goscinny, elle réussit à imposer ses histoires où domine le ridicule au féminin, bientôt reprises en albums chez Dargaud (Les États d'âme de Cellulite, 1972 ; Les Angoisses de Cellulite, 1974). Puis, avec Salades de saison (1973), apparaissent des récits en planches et un graphisme plus stylisé. Ses débuts sont inspirés par le minimalisme efficace de dessins humoristiques des Américains Brant Parker et Johnny Hart (B.C. et The Wizard of Id, de 1964 à 1997). Autre influence déterminante, celle de Jules Feiffer, dessinateur new-yorkais illustrant les travers des intellectuels américains au Village Voice.Tentée par l'aventure de L'Écho des savanes avec Marcel Gotlib et Nikita Mandryka en 1972, elle y donne Le Cordon infernal (1973), une fantaisie qui se retrouve sous une forme encore plus débridée la même année avec « Les Amours écologiques du Bolot occidental » dans le mensuel Le Sauvage (album autoédité en 1977).En 1973, elle est invitée par Le Nouvel Observateur à donner une image moqueuse de la rédaction de l'hebdomadaire. Elle laisse alors libre cours à une critique imparable des contradictions dans lesquelles se débat un microcosme de citadins aisés des années 1970 : « Ce sont des gens qui pensent à gauche et qui vivent à droite ! » répète-t-elle à différents interviewers. Se gardant de tout militantisme, elle dresse le tableau

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